13 octobre 2007

Une terrible solitude

Tout va bien, les choses se mettent en place. Comme l'année dernière, mais différemment, les minutes s'écoulent poliment, les unes après les autres, mais chacune est une petite flèche empoisonnée. Toutes blessent, la dernière tue.
Derrière une facade convenable, correcte, une vie ordinaire et même satisfaisante, il n'y a rien et j'en ai marre! Pourquoi les choses ne peuvent-elles pas aller, tout simplement? Comment font les autres? Les autres ont des familles, des amis, des vies sociales. Ma famille est lamentable, et même ceux qui sont à peu près convenables me semblent pourris de névroses. Je n'ai plus d'amis véritables, et puis je passe les gens à ce point au crible de mes mésaventures anciennes que pas un ne peut en réchapper.
Il fut un temps où je crois, j'étais toujours contente de rencontrer de nouvelles personnes. Mes dernières "amitiés "ont été si affreuses que je me méfie de tout, ce qui n'est pas agréable, mais c'est plus fort que moi. Je veux être seule, alors qu'en société je m'amuse toujours, mais les heures qui suivent ces bons moments sont suivies de tels dégoûts que la solitude, avec son amertume, me paraît préférable.
J'ai appris à me méfier des gens disponibles. Si vous arrivez dans un nouvel environnement et qu'une personne est aussitôt disponible pour s'occuper de vous, alors qu'ancienne dans l'environnement, elle devrait être occupée, et n'avoir qu'une fraction de temps à vous consacrer, je trouve cela suspect. Ai-je raison? Mon expérience me montre que oui. Or, j'ai rencontré une telle personne, avec enfants, et je m'inquiète de l'avenir. Pourtant, je sais à quel point les pensées négatives sont néfastes, mais c'est plus fort que moi.
Mon environnement précédent avait pour lui l'ancienneté; il était rempli de mensonges, je n'étais qu'une écorce, mais tout allait très vite, j'étais très occupée et même si ce vide me pesait, mes activités m'emportaient. Aujourd'hui, le vide de ma vie nouvelle éclaire cruellement ma situation. Certes, je réussirai probablement à m'étourdir d'activités, ici aussi, mais qu'est-ce que cela signifie?
Comment font les autres? Pour mon malheur, je ne vois que mensonges partout. De loin, je vois des gens dont la vie me paraît enviable, avec amis, famille, harmonie. Chaque fois qu'il m'est donné de me rapprocher d'eux, je découvre un néant similaire au mien, dont ils ne sont, je crois, pas toujours conscients. Est-ce ceci, la vie humaine?
Il m'arrive de croire en Dieu, de sentir Dieu, comme une chaleur créatrice. Mais pas en ce moment. Je ne l'ai pas assez cultivé, probablement. Je ne sens que le froid, le vide, le néant. Tant pis. Ce petit jeu me fatigue, je me suis assez laissé dire qu'il nous a créé pour que nous nous tournions volontairement vers lui, j'en ai marre, il n'a qu'à faire un geste, ou nous créer moins cons, plus perceptifs - merde. Ou sans libre arbitre, je ne sais pas, mais ces petits jeux intellectuels, marre.
S'il n'y avait pas les enfants. Je' ne suis gaie que pour eux. Je leur fais des sourires, des blagues - j'espère que le néant ne se voit pas trop.
Certes, un déménagement, le changement de pays, tout cela perturbe. Mais le mal est plus profond.

6 commentaires:

Anonyme a dit…

la méfiance n'arrange rien au contraire, elle t'enferme, t'isole, te coupe des "autres".
si une "ancienne" d'un groupe comme tu le cites vient te voir alors que tu es nouvelle c'est peut etre pour t'integrer dans le groupe... Non?
Je ne dis pas que ma méthode est la meilleure mais elle m'aide, quand je subis ou vis un echec j'en tire le meilleur, pour eviter de recommencer les memes erreurs. Et ça fonctionne plutot bien.
Seulement pour cela il faut une chose... la confiance... meme en soi.. pas evident je sais

Anonyme a dit…

Tu es où en Espagne ?
Pour ma part je suis à Madrid... j'ai mis du temps à trouver mes repères. Je les ai trouvés au bout de 18 mois... dans un groupe de Françaises, et ça fait deux ans que ma vie est plus jolie.
Moins on voit de monde, plus on se referme, moins on est apte à parler aux inconnus...
Ca ne t'aide sans doute pas d'entendre ça... mais si tu veux discuter "en privé"... tu es la bienvenue !

Anonyme a dit…

Tu poses beaucoup de problèmes en même temps. Famille, amitié, vie sociale, angoisse existentielle, solitude, le bonheur (ou pas) des autres, hypocrisie, Dieu, le néant, dépaysement... Je les énumère un peu comme ça pour me rendre compte à quel point ça te pèse. Tu as plusieurs voies à ta disposition, te bourrer de Prozac en est une —pour certains, ce serait peut-être la plus évidente mais je n'y crois pas trop (la course à pied lui est sans doute préférable). "T'étourdir d'activités" comme tu dis, en est une autre —bien meilleure aussi. À propos de ta méfiance, je te comprends plutôt bien (non seulement parce que je lis ton blog depuis quelques mois) : ton raisonnement sur la disponibilité est probablement faux, à mon avis le risque est plutôt que ces personnes qui t'offrent leur aide deviennent trop envahissantes et essayent de planifier ton temps puisque tu n'as rien de mieux à faire que d'être avec eux... Le truc est de rendre les choses claires dès le début (??). J'ai lu quelque part d'autre qu'il faut aussi "se méfier de ceux qui vous placent sous [sur?] un piédestal, même pas très haut. Ce sont des flatteurs". Mais là, je suis moins d'accord, ça dépend de qui, des circonstances...

J'ai déjà été encore trop long. Mais finalement, je n'ai pas grand chose à dire (encore moins qui puisse t'être d'une vague utilité). De toute façon, j'apprécie beaucoup ton courage (celui de partager avec des inconnus ces états d'âme pas très gais — j'espère qu'ils seront temporaires).

antagonisme a dit…

Merci à vous trois! ça va mieux aujourd'hui. En revenant d'accompagner mon fils à l'école, j'ai vu le soleil sur un bâtiment, rosir le mur, avec l'ombre d'un palmier par dessus; c'était ce qu'il me fallait, quelque chose de poétique et d'inutile. Je me suis sentie faire de nouveau partie du monde, c'est tout ce que je demande. Merci à Fa et Florence pour leurs remarques sympathiques et pleine d'un bon sens qui m'est inutile, hélas, ou pas hélas, sûrement hélas quand j'ai le cafard (augmenté par le sentiment d'étrangeté du au déménagement et à mon appart pas fini, quoique j'en dise): je suis affecté d'un syndrôme asocial, assez bizarre, puisque je rencontre toujours plein de gens, même maintenant que j'essaie de fuir. Mieux, pire : les gens me trouvent en général sympa et rigolote, parce que comme je ne peux pas leur dire toutes les horreurs que je pense d'eux (c'est celui qui le dit qui y est : elles ne saliraient que moi), je suis aimable et je dis plein de conneries marrantes. Quoiqu'il en soit, le jour où je voudrais m'intégrer, je le ferai, je suis un as de l'intégration à la hache. Le problème, c'est que c'est la quatrième fois que je change de pays et que toutes ces procédures d'intégration m'écoeurent, même si elles fonctionnent. Ce que je ressens est difficile à expliquer, ce sont des impressions "intérieures". Il faudrait donner trop d'exemples; en fait il ya un moyen de tout expliquer, je vais peut-être l'utiliser du reste, mais il n'est pas facile : écrire une nouvelle sur le sujet. Mais Fa et Florence m'ont fait une remarque pleine de sens, et je sais que c'est vrai : la méfiance n'est pas bonne; se refermer est très mauvais. Ce n'est pas aux gens que je dois m'ouvrir, mais à un ensemble plus vaste qui les inclut : la vie, les mois qui viennent, le jour, le soleil, le monde... J'ai dit une fois qu'il fallait toujours sourire : il faut que je souris, intérieurement, à ce qui va m'arriver. Je dois avoir confiance dans l'avenir. Il m'arrive toujours des trucs bien, même si j'ai ce problème dans mes relations avec les autres (le problème est de ne pas apprécier les gens, et non pas d'avoir peur de les rencontrer, je précise pour mes deux commentatrices).
Pablo, tu me connais mieux et tu es plus proche de ce qui m'arrive. je ne prendrai pas de Prozac, et j'essaierai de donner un sens à mes activités, encore que je ne sais pas quel sens avaient mes activités de l'année dernière (à part remplir mon compte en banque).Ce que tu dis sur la disponibilté est vrai (les gens qui deviennent envahissants). Mais dans les petits monde à l'étranger, les nouveaux sont un peu comme de la chair fraîche : il faut renouveler le stock, tu comprends; en tout cas c'était le cas avant. Ah, une nouvelle; analyse : 4x4? Age des enfants? Look? Profession du mari? Et pof, elle tombait dans sa catégorie; et si elle ne tombait pas dans la bonne (par exemple une 4x4 du quartier chic qui fréquentent des R5 mariée à des locaux), le malentendu ne durait guère plus d'un an - il ne survivait pas aux vacances d'été et était dissipé à la rentrée d'après; et je ne caricature même pas; au Lycée Français de Madrid, si tu cherches un peu, tu pourras sûrement faire des catégories; plus complexes, d'accord, parce que grande ville. Moi, qui suis en fait la plus snob de tous, je déteste tout le monde parce que de toute façon aucun n'aime Proust.
Je maintiens ce que je dis sur les piédestals. Chaque fois que j'ai rencontré quelqu'un qui me mettait sur un piédestal, où je ne voyais pas pourquoi j'aurais été mise, ça s'est mal fini; sur le mode "finalement tu es comme les autres". (les gens qui mettent les autres sur un piédestal ont un problème d'image d'eux-mêmes; ils essaient de se faire aimer - les gens que j'ai rencontré ici ne m'ont mis sur aucun; ils sont, sous ce rapport, normaux).
Pablo, c'est facile de partager avec des inconnus, justement. Beaucoup plus qu'avec ceux qu'on connaît. Enfin, pas si facile que ça, parce que c'est la première fois que je me laisse aller; je vais essayer de ne pas le refaire. Manque d'élégance. Mais bon, un blog, ça sert aussi à ça.

Anonyme a dit…

Le néant est en chacun de nous. Même en tes enfants, bien qu'ils soient trop jeunes pour le percevoir. Il est un peu effrayant, et c'est pour ça, j'en ai conscience, que j'ai une vie plus que remplie. Ce néant doit être une des énormes choses qui sont à apprivoiser venant de soi-même.
Quant à ta méfiance, on ne peut pas reprocher à un animal battu d'avoir peur des gens. Il faut juste savoir repérer ceux qui sont plus disponibles que les autres, et qui sauront te ré-apprivoiser.
Tu es comme le renard du Petit Prince...

antagonisme a dit…

Ouh, gentille Marionette! Eh bien, je vais faire une approche lente, pour repérer les gens sympas. J'ai le temps, une bibliothèque garnie, plein de DVD et Internet.