30 mai 2007

Triste

Le mois de juin va commencer, les adieux avec.
Déjà deux personnes qui sont "bouleversées" par mon départ. Des personnes que je voyais peu, mais, depuis 6 ans, je faisais partie du paysage. Alors on ne se voit pas, on ne se parle pas, il n'y a pas de sympathie palpable, mais je fais partie du décor, je suis une petite institution locale. Probablement est-ce pour cela qu'on ne me parle pas vraiment, je suis "Anta", avec mes deux enfants, mon mari qui faisait un truc avant et qui en fait un autre maintenant, un truc socialement visible.
Des institutions locales, il y en a plusieurs ici, donc je sais exactement ce que je veux dire et ça m'énerve. Tous ces imbéciles, avec leurs petites vies, et dès qu'on adresse trois fois la parole à un consul honoraire et qu'on remplit des critères finalement faux et artificiels, on est "quelqu'un" : 4x4 + Farid Zaghouani + prof + mari visible et respectable + liens discrets avec les assoc des Français de l'étranger+signes extérieurs de richesse = quelqu'un.
Est-ce que quelqu'un a pensé que dans son style (le style ours), mon mari était un grand professionnel? Est-ce que quelqu'un m'apprécie parce que j'essaie d'instruire des enfants? Est-ce que quelqu'uns'est dit qu'on aimait ce qu'on faisait et qu'on essayait de le faire bien? Non! Ils ne nous ont jugé que sur des critères artificiels et faux.
Donc j'ai eu raison de jouer mon Maître Cornille quand l'Ours a changé de boulot. J'ai eu raison de prendre des airs imperturbables, de ne pas voir les sourires entendus. J'ai fait ma princesse et ça a marché. Oh, je continuerai à le faire, si besoin est. Etre le sujet des médisances des imbéciles m'est insupportable, je préfère de loin faire ma bêcheuse. Mais n'est-ce pas minable?
Est-ce que toute la vie est comme ça? Est-ce que je ne vivrais jamais autour de personnes devant qui je pourrais être découragée, démoralisée, écoeurée? Est-ce que je ne pourrais jamais, tout en reconnaissant mes compétences, avouer leurs limites, sous peine d'être aussitôt mal jugée? Est-ce que le monde dans lequel je vivais avant mon départ de France a à jamais disparu?
Quand j'étais enfant, je voulais devenir folle, et être internée pour toute ma vie, demeurer fermée au monde pour ne pas le voir, vivre dans mon monde, et il était très bien, mon monde.
Je me suis dit que ce n'était pas bien, car, n'est-ce pas, ce n'était pas bien. Il faut être intégré, conforme, semblable, identique, consommateur. Pourquoi ne pas demeurer fermé au monde? Qu'a-t-il de si remarquable? c'est la peur qui m'en empêche. Si j'avais assez de courage, je me dépossèderais de tout et j'irai mendier. Je pourrais même le faire en priant Dieu. Mais je n'ai pas de courage. Je reste au chaud.

1 commentaire:

Etolane a dit…

Se conformer! Un concept que je n'arrive toujours pas à intègrer. Très beau texte...